dimanche 1 juillet 2012

Le jardinier


Ce matin, j’ai refait le jardin.
Comme on refait un monde…
Les mains dans la terre, les papillons qui passent, emmêlés aux fleurs des pruniers qui picotent le jardin. Mes muscles qui se lamentent… Je suis déjà vieux comme un bout de terre qui a fait son chemin.
J’ai la chair un peu crevassée.

Mais j’ai l’âme de enfant tout propre, nettoyé des saletés de l’existence. Un moustique est un monde, un brin d’herbe, les nuages qui passent. C’est rien mais c’est tout.
Qu’est-ce que le bonheur, sinon qu’être tout dans ce fouillis d’herbes dites mauvaises. D’être pareil, rien que pareil. Sans orgueil, sans vanité.




La nature ne se fait pas plus belle quand on travaille à l’organiser. Elle est équilibre. Tout le secret est là. Elle ressemble a un esprit libre qui laisse son imagination aller. Sans rien choisir ce qui est beau, parce que la beauté n’est pas une organisation, c’est tout le contraire. Dans cet anarchisme, du moins apparent, se cache la création. Tout ce vert, ces coloris ne sont que l’œuvre d’un esprit libre. Un Dieu?

La plus belle leçon est d’écouter du regard la vue d’une chorégraphie déroutante, architecturée à la fois dans sa recherche, dans ses trouvailles ramenées et ses nouveautés.
L’art n’est qu’une activité pour retrouver cette façon d’être.
L’art est pour soi. Mais un soi n’est jamais un soi seul. C’est une partie d’un nous.
Il n’y a rien à vendre dans cette recherche.
Personne ne créé, ici-bas. Tout le monde copie.
La beauté ne se crée pas, elle se découvre.
Écrire est, d’une certaine façon, dérisoire. C’est une vidure, une tentative. Au delà de tout, c’est essayer de montrer à un aveugle ce qu’il ne peut voir. Ça reste un acte personnel.
À l’université, il n’y a pas d’études sur le pissenlit, le papillon, les nuages, et le vieux clou rouillé qu’on découvre en travaillant la terre.
Je ne sais pas qui a donné toute cette vie à ce monde. Je sais cependant que les humains se sont dit : «On peut faire mieux».
On ne peut pas faire mieux, parce que le meilleur est devant soi.
La difficulté est de reconnaître que le vrai modèle est en nous.
Exister, à la manière occidentale, c’est nier. Nier qu’on est pauvres d’esprit.
Il n’y a pas d’âme dans les travaux humains.
Il n’y a pas d’argent au ciel non plus.
Quand je mourrai, le jardin deviendra un fouillis inorganisé.
Il naîtra un autre jardinier.
Saura-t-il que ce qu’il fait pousser n’est autre que lui?

Gaetan Pelletier

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