dimanche 15 décembre 2013

Et rien ne fut jamais plus comme avant...

Après que tout fut terminé, que les armes se soient tues et que les routes furent à nouveau ouvertes, la ville commença à revivre normalement.

Mais cette "normalité" ne pouvait se concevoir que pour les gens qui n’avaient pas connu les événements.

Pour les autres, ceux qui avaient traversé toutes les épreuves et avaient survécu, les choses ne furent jamais plus comme avant.

Et pour ces gens-là, même si le nouveau monde laissait entrevoir de fantastiques opportunités, elles ne le seraient probablement jamais…



Lorsque les médias nous parlent de gens ou de lieux qui ont connu des événements dramatiques tels que des guerres civiles, tremblements de terre, famines ou autre, ils portent notre attention sur le nombre de morts, les coûts de reconstruction, la quantité de nourriture fournie par l’aide internationale, ou bien encore le nombre de sauveteurs dépêchés sur place par les organisations humanitaires.

La plupart du temps, ils vont se contenter d’énoncer des faits ou des chiffres, sans trop s’attarder sur les images. Je veux dire les vraies images, celles montrant ce que les gens ont réellement vécu, car 
l’immense majorité des téléspectateurs ou des lecteurs ne veulent pas voir de telles
choses.

Rarement les reporters essaieront de vous décrire les horreurs de la gangrène, l'odeur épouvantable des corps en décomposition, ou vous montreront des enfants en train de manger des pâtes infestées de vers, mais néanmoins heureux de leur sort compte tenu de ce qu’ils avaient pu manger les fois d'avant...

Ou des choses toutes simples, comme se retrouver trempé par une nuit glaciale, et d’avoir à rester ainsi pendant des heures terré dans un trou, à se cacher du danger.

Pourtant, le fait est qu’il n’existe pas de "retour à la normale" pour certaines expériences. Un homme pourra se sentir heureux d’être toujours en vie, de disposer encore de tous ses membres, ou d'un médecin sans frontières qui l'assiste à son chevet. Mais le vrai retour à la normale n’a pas de rapport avec le nombre de trousses de premiers soins qui sont distribuées dans un pays touché par une catastrophe, ou le fait de savoir si la mairie du lieu dispose à nouveau de parterres de fleurs.

Si vous planifiez un scénario de chaos, n’oubliez pas d’y inclure une bonne dose de changement drastique, et ce changement inclut aussi le vôtre...

On peut voir sur les nombreux forums dédiés à la survie, des gens discuter tranquillement de nourriture lyophilisée, de panneaux solaires et autres techniques d’énergie libre qui leur permettraient de conserver une existence à peu près décente en cas d'effondrement. Mais cela ne représente qu’une partie de la préparation, et la plupart de ces personnes sont complètement ignorantes de l’autre, ou ne l’imaginent même pas.

En fait, il leur manque juste la moitié, celle qui est la pire.




Se préparer mentalement


Lorsque je songe à ce que pourrait être un véritable entraînement pour se préparer au mieux au jour d'après, il me vient l’idée d’un séjour en enfer ; une minuscule pièce dans laquelle j’enfermerais les gens pendant une semaine entière, avec seulement quelques boissons, un simple seau en guise de toilettes, un peu de graines ou d'aliments très basiques, et une vieille carcasse de viande en train de pourrir tranquillement dans un coin, juste pour l’odeur.

Vous allez penser que ce serait peut-être un peu exagéré, mais au moins, vous voyez ce que je veux dire.

Pour commencer, vous pourriez vous contenter de quelques sorties sur le terrain. Pour vous habituer à l’idée de faire vos besoins dans la nature, si plus tard vous avez cette chance, et de le faire proprement en creusant un trou puis en le rebouchant. Ré/apprendre les choses simples de la vie, les gestes les plus élémentaires, ceux que les hommes répètent depuis la nuit des temps et qui pour la plupart ont été oubliés aujourd'hui.

Si vous n’incluez pas le changement dans votre paradigme, ou que vous ne préparez pas votre esprit dans ce sens, tout le temps que vous pourriez consacrer à l'apprentissage de la survie et aux préparatifs pourrait certes vous aider à tenir physiquement, mais au bout du compte, vous y laisseriez votre santé mentale.

C’est ce qui est arrivé à beaucoup de gens qui ont connu les affres de la guerre civile.

Un bon nombre sont devenus des alcooliques, d'autres des drogués, d’autres encore des cas sociaux incapables de se faire des amis ou de simples relations. Certains paraissent "normaux" à l’extérieur, mais ils ont en fait un côté sombre, voire totalement éteint.

Quelques-uns continuent de vivre comme ils le faisaient pendant le chaos, avec violence, et la violence est devenue leur gagne-pain.

Comme si quelqu'un avait tracé une ligne dans le temps, et décidé qu’avant, beaucoup de choses étaient acceptables en raison de l'état de guerre, mais qu’après, il fallait de nouveau se comporter comme un homme raisonnable, sans tuerie ni vol ; sauf que certains n'ont pas voulu accepter un tel changement, ou n'ont pas pu. Ils ont continué à tuer des gens, ou fini par se suicider.

Une fois que vous avez défoncé la figure de quelqu'un à coups de poing, il devient beaucoup plus facile de le faire. En agissant ainsi la première fois, vous avez brisé une barrière psychologique qu’il n’est pas facile de reconstruire. La chose est également vraie en ce qui concerne des actes plus violents.

Prévoyez une manière de retourner à la normalité, d’expliquer à vos enfants pourquoi les hommes agissent mal. Imaginez de quelle façon vous pourriez vous réintégrer dans le monde d'après, en admettant que vous en réchappiez sain et sauf, et participer à sa reconstruction de manière positive.

Les gens qui sont passés au travers d’épisodes réellement dramatiques sont en général incapables de voir après coup certaines choses, notamment l’amour et le bonheur. Comme si ces choses-là avaient été tuées au milieu de toutes les atrocités.

Certains en ont pris conscience des années plus tard, et se sont alors suicidés ; les uns avec des armes, les autres avec de l’alcool ou de la drogue. Certains sont toujours là. Ils vivent, marchent et travaillent à la façon des zombies, prétendant être en vie, alors que d’une certaine manière, ils ont été tués pendant la période de chaos...




Ils sont morts à l'intérieur


La survie n’est pas seulement dure pour le corps, elle l'est encore plus pour l'esprit. Vous survivez, mais vous n’êtes plus qu’une coquille vide. Vous avez sûrement entendu parler des Troubles de Stress Post-Traumatique (TSPT) ; c’est en fait ce que j’appelle être mort à l’intérieur. Mais il n’est pas obligatoire que de tels désordres apparaissent.

Cependant, survivre à un scénario de chaos et continuer à vivre dans un monde "normal" n’est pas aussi simple. On ne peut pas mettre des barrières claires pour séparer les différentes périodes de sa vie, et arrêter de penser aux moments difficiles.

Imaginez qu’un tremblement de terre survienne dans la zone où vous vivez, et que toutes les assiettes de la cuisine tombent et se brisent. Vous pourriez toujours ramasser les morceaux et les remettre rapidement dans les placards, il n’empêche que les assiettes seront toujours cassées. Vous pourriez les cacher, mais elles seront toujours cassées. Le fait d’éloigner les choses ne va pas les arranger.

Lorsque nous naissons, nous apprenons à croire aux gens. Lorsque l'on expérimente plus tard ce qu'ils sont capables de faire, ou l'espèce d’animal que l'on peut soi-même devenir, cette confiance est difficile à reconstruire.

Souvent, ce sentiment que "quelque chose s'est brisé" ne vous quitte plus de toute la vie. Vous essayez juste de vivre aussi normalement que vous le pouvez.

Mais c’est toujours là.

C’est un sentiment permanent. Par exemple, tout a l’air de bien se passer, puis soudain, quelque chose se produit qui vous ramène en arrière. Ce peut être la perception d'une odeur, ou d'un son. Il peut s’agir d’une histoire vieille de 20 ans, mais pour vous, c’est toujours là.

Ou vous prenez tranquillement un café à la terrasse d'un bar, et vous vous surprenez à regarder les autres clients en vous demandant : "Combien cet homme est-il dangereux ?", ou "Cache-t-il un Glock 9 mm dans ce sac banane noir qu’il porte à la ceinture ?", ou encore "Ce gars en blouson noir a certainement un couteau papillon dans la poche", etc.

Vous pourriez vous dire "C'est terminé, il est temps que je tire un trait sur tout ça", mais vous vous apercevez que c’est votre vie à présent.

Pensez-vous vraiment qu'on puisse passer au travers de mois d’effondrement, côtoyer la mort des dizaines de fois, et en ressortir totalement "propre", apte à retourner à la vie normale ? On ne le peut pas. Ce n’est pas aussi simple, ni aussi romantique.

N’oubliez jamais votre âme sur le champ de bataille, au risque un jour de vous réveiller vivant mais vide…




Accepter de faire ce que l'on doit faire


La préparation mentale est presque plus importante que les préparatifs et la préparation physique dans un contexte de chaos. Si vous n'êtes pas capable d'accepter ce qui arrive et de penser clairement, vous allez rapidement devenir un danger pour vous-même et pour vos proches.

La première étape dans la préparation mentale est de comprendre les types d'émotions qui apparaissent dans ce genre de situation. Donc, autant le dire tout de suite, vous allez vous sentir tour à tour émotionnellement épuisé, physiquement ou mentalement fatigué, mal voire à chier, submergé, engourdi, triste, frustré, peureux voire terrorisé, irritable ou solitaire, etc. Et il est fort probable que vous ayez du mal à prendre des décisions dans l'instant. Bien entendu, cela s'applique aussi aux membres de votre famille, à vos amis, et d'une manière générale, à tous ceux que vous côtoierez.

Ces réactions sont normales, et quel que soit votre degré de stoïcisme ou de logique, vous allez immanquablement les éprouver. L'important est donc de ne pas être pris au dépourvu, de manière à ne pas prendre les mauvaises décisions qui remettraient en cause votre survie.

Nous allons tous nous trouver dans une situation de stress extrême ; il n'y a aucun doute à ce sujet. Il est d'autant plus fondamental de contrôler la manière dont nous réagissons à ce stress. Des tas d'émotions débilitantes ou inutiles vont se presser au portillon, et ce ne sera certainement pas le moment d'y succomber.

La culpabilité est l'un des grands classiques dans le lot des sentiments qui accablent après coup les survivants d'un chaos. Surtout lorsque des amis ou des membres plus jeunes de la famille s'en sont allés. On se dit alors "Pourquoi pas moi ?", et l'on en vient presque à regretter d'être encore en vie. Comme si ça pouvait être notre faute que des gens meurent dans ce genre de situation !

La meilleur moyen pour éviter autant que possible les désordres mentaux est D'ACCEPTER LE CHANGEMENT. J'ai déjà mentionné ce point dans d'autres articles, et il est fondamental. Le jour où les lumières vont s'éteindre marquera le déclenchement du "Mode survie". Cela signifie plus de lois, plus de règles, plus de police, plus d'ordre, plus de justice, plus d'eau, plus de bouffe, plus rien...

Cela signifie qu'il va falloir nous battre physiquement, et faire certaines choses dont nous serions probablement incapables à l'instant où j'écris et que vous me lisez ; cela signifie que l'on va souffrir, gémir, trembler, pleurer, supplier, tuer, et peut-être mourir. Et cela vaut autant pour nous que pour nos proches. Le savoir, c'est y être à moitié préparé.

Pour la majorité de nos contemporains, cet état de fait est tout simplement inimaginable. Et c'est à mon sens ce qui différencie véritablement la masse des gens par rapport aux survivalistes, au-delà de tous les équipements que ces derniers pourraient avoir en plus. En d'autres termes, la capacité d'adaptation. Une telle faculté n'est pas donnée à tout le monde, de même qu'elle n'est pas non plus l'apanage exclusif du survivaliste.

Entre quelqu'un qui ne s'est en aucune façon préparé, mais possède cette capacité, et un survivaliste équipé qui en est dénué, lequel d'après vous aura le plus de chance de passer le cap ?

A l'instant même où vous comprendrez que le chaos s'est installé, vous devrez être en mesure de permuter complètement votre esprit vers ce nouveau paradigme. C'est une question de vie ou de mort. Imaginez un interrupteur "Survie" dans votre tête, qui vous permette d'effacer tous les comportements de gonzesses que l'on vous a inculqués depuis la maternelle, et de retrouver les instincts de l'homme des cavernes. Vous y êtes ? Eh bien c'est celui-là qu'il faudra actionner.




Cela signifiera qu'à cet instant, la violence deviendra partie intégrante de notre vie, jusqu'à ce que tout revienne à la normale, et c'est un fait que nous devrons réaliser et accepter. Ceux qui ne pourront s'y résoudre seront éliminés, sans autre forme de procès.

Cela ne veut pas dire nécessairement que l'on pourra ou devra tout faire, cela veut dire qu'il faudra être en mesure de faire ce qu'il faut le moment venu pour sauver notre peau ou celle de nos femmes et enfants. Sans se poser de question. Le faire parce que nous mourrons si nous ne le faisons pas. C'est presque aussi simple que ça.

Nous vivons dans des sociétés beaucoup trop policées, bien trop civilisées. Nous sommes devenus trop délicats et trop raffinés. Les décennies d'après-guerre nous ont complètement déconnectés de la loi naturelle et des réalités de la survie. Que cela soit bien ou mal n'est pas la question. C'est un fait, c'est tout.

Même si rien ni nous-même ne seront jamais plus comme avant, en admettant que nous survivions à la transition, le fait d'intégrer ce paradigme en notre âme et conscience devrait permettre de ne pas finir en zombie dénué de raison de vivre. On devrait toujours ressortir plus grand d'une épreuve, et c'est sans doute la raison pour laquelle la destinée de l'homme est d'en placer autant sur son chemin.

Le monde d'après sera une extraordinaire opportunité pour ceux qui auront passé le cap. Mais un tel privilège ne souffre d'aucune faiblesse, d'aucune hésitation, d'aucune déficience mentale. A nous de relever le challenge, et faire en sorte d'y participer...

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