dimanche 6 mai 2012

ne pas sortir le champagne ,tout de suite svp...


Une «entente de principe» fragile est conclue entre le gouvernement et les étudiants

La ministre de l'Éducation Line Beauchamp tient à parler d'«entente de principe». 
 
 
 
 
La ministre de l'Éducation Line Beauchamp tient à parler d'«entente de principe».
Québec—Après 22 heures de pourparlers à Québec, les représentants des quatre associations étudiantes et le gouvernement ont annoncé peu avant 15h30 qu'ils s'étaient entendus sur un texte susceptible de mettre fin à la crise suscitée par la hausse des droits de scolarité.

Mais l'entente demeure fragile, puisqu'il y mésentente sur l'entente.

Le gouvernement et les associations étudiantes ont tous signé une «feuille de route» visant à sortir de la crise qui sévit depuis 13 semaines, mais ils n'en font pas la même interprétation. Les étudiants y voient un «moratoire» technique sur la hausse des droits de scolarité. La ministre de l'Éducation Line Beauchamp, un «maintien de la hausse».

En conférence de presse samedi soir, Mme Beauchamp a sursauté devant l'utilisation par les associations étudiantes du mot moratoire : «J'en suis vraiment désolé. C'est un vocabulaire qui n'a jamais été utilisé pendant 24 heures de discussions», a-t-elle insisté. Plus tard, elle s'est dite «médusée» par la conférence des étudiants.

En fin d'après-midi la ministre de l'Éducation Line Beauchamp tenait à parler d'«entente de principe». Les chefs syndicaux qui sont sortis les premiers de la salle de réunion ont annoncé «une feuille de route» qui «va permettre de sortir de la crise», selon les termes utilisés par Louis Roy de la CSN. «Ce n'est pas une "entente", mais on a les éléments qu'il faut pour ramener nos étudiants sur les bancs d'école», a pour sa part soutenu Jean Beauchesne, président de la Fédération des Cégeps.

«Ce n'est pas la fin mais c'est le début de la fin», a par la suite opiné Martine Desjardins, la présidente de la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ), soutenant que ce document allait devoir être soumis aux voix des assemblées étudiantes.

Les représentants des quatre associations étudiantes —la FEUQ, la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ), la Table de concertation étudiante du Québec (TACEQ) et la Coalition large de l'association pour une solidarité syndicale étudiante (CLASSE) — ont cependant préféré parler d'une «offre» de la part du gouvernement, «offre» qu'ils soumettront à leurs membres le plus vite possible, ont-ils dit.

«C'est une offre, ce n'est pas la fin de la grève, ce seront les assemblées générales qui se positionneront sur le contenu de cette offre là tout au long de la semaine prochaine», a déclaré Gabriel Nadeau-Dubois, porte-parole la CLASSE.

Les porte-parole des associations ont cependant décidé de ne pas recommander cette offre à leurs assemblées. «On peut utiliser les mots qu'on veut [pour désigner le document], mais de notre côté, il n'y aura pas de recommandation formelle», a affirmé Léo Bureau-Blouin, président de la FECQ. Toutefois ce dernier a promis de «prendre le bâton du pèlerin» afin d'«expliquer le contenu de cette offre» aux assemblées.

Création du CPU

L'entente stipule qu'un organisme sera créé, le Conseil provisoire des universités (CPU). Celui-ci fera à la ministre de l'Éducation des propositions «d'optimisation des ressources financières» dans la gestion des universités. Toute économie suggérée par le Conseil sera «appliquée en réduction des frais institutionnels obligatoires (FIO)», aussi connus sous le vocable de «frais afférents».

L'entente précise ensuite une «mesure temporaire» pour le trimestre d'automne 2012, en attendant le dépôt du rapport du CPU, prévu au mois de décembre. Il s'agit du «paiement d'une somme de 125$ par étudiant à temps complet, à tire de FIO» qui «sera différé jusqu'au dépôt des recommandations à la ministre».

Aux yeux de la ministre, ce montant devient une sorte de «compte à recevoir» pour les universités, qui normalement encaissent cet argent. Si les économies ne sont pas au rendez-vous, les étudiants devront assumer cette facture.

Compensation

Pour les associations étudiantes toutefois, le paiement différé constitue une compensation pour la hausse. C'est, selon eux, un «retrait équivalent» à la hausse, mais en FIO.

Martine Desjardins, présidente de la FEUQ, estime qu'il sera «facile» de dénicher des économies équivalentes aux 125$ ajoutés par session pendant sept ans (254 $ par année, 1778 dollars au total) par le plan du gouvernement Charest de hausse des droits de scolarité.

Il n'est toutefois pas certain, a admis Mme Desjardins qu'il en sera ainsi : «C'est un pari», a-t-elle indiqué en anglais. Son collègue Léo Bureau-Blouin, président de la FECQ, a aussi parlé de «pari» : « Le pari qu'on fait est qu'il est possible de dégager des millions et des millions de dollars qui, plutôt que de retourner dans le fond consolidé, vont retourner en diminution de la contribution étudiante ».

De plus, si jamais le CPU n'arrivait pas à remettre son rapport avant le 31 décembre 2012, «la mesure temporaire» de 125$ se trouverait «renouvelée pour le trimestre d'hiver 2013». Selon les porte-parole donc, les étudiants pourraient bénéficier d'un an de «moratoire» technique.

La composition du CPU sera complexe et risque d'occasionner beaucoup de débats sur ce qu'est ou non une dépense excessive. Y siégeront six recteurs ou leur représentants, quatre représentants étudiants, quatre des milieux syndicaux, deux des milieux des affaires (désignés par la ministre), un représentant des cégeps, un du ministère de l'Éducation et un président du CPU, désigné par la ministre.

Au reste, Martine Desjardins a souligné le «cadre électoral» dans lequel s'inscrit l'entente : «Il est fort probable que l'entente que l'on a pourrait changer advenant le fait que les libéraux ne seraient plus au pouvoir.»

Plus de manifestations?

Au dernier article de l'entente, les représentants des associations étudiantes s'engagent à la soumettre au vote de leurs membres. Ils ont admis qu'ils auront de grands efforts à faire pour faire comprendre l'entente à leurs membres. Le texte précise que les représentants «s'engagent à ne pas organiser de manifestations liées à cette entente».

Aux yeux de Gabriel Nadeau-Dubois, porte-parole de la CLASSE, l'entente est «la preuve que la grève a porté fruit». La ministre a tenu à dire que c'est au nom de l'Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSE) que ce dernier était présent et a signé l'entente. Depuis plusieurs semaines, elle refusait de négocier avec M. Nadeau-Dubois parce qu'il n'avait pas, à ses yeux, dénoncé assez clairement la violence qui avait marqué plusieurs manifestations contre la hausse.

Un bout de chemin

Plus tôt dans la journée, la ministre Line Beauchamp avait soutenu que lors de la «rencontre intensive» de 22 heures, «chacun a fait un bout de chemin». Elle a assuré que «l'entente» était «à la satisfaction du gouvernement». «Ce qui me rend la plus satisfaite dans les circonstances, c'est le fait de savoir que des étudiants qui veulent retourner suivre leur cours vont pouvoir le faire», a-t-elle ajouté.

Mme Beauchamp était accompagnée à la table par la présidente du conseil du Trésor Michelle Courchesne ainsi que le ministre délégué aux Finances, Alain Paquet. «Nous espérons vraiment que cette entente puisse permettre un retour [en classe] pour aller poursuivre les cours, subir ses examens, obtenir son diplôme le plus rapidement possible pour les étudiants qui étaient en boycott en ce moment», a insisté Mme Beauchamp.
 

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